Chronique d'un machisme ordinaire
Alors voilà comment le blog et moi on
a failli retourner se coucher définitivement...
A l'origine lui et moi, on était
surtout là pour déconner.
Parfois pour alerter et mettre le doigt
sur les situations ubuesques dans lesquelles se retrouvent les nanas
d'aujourd'hui...pour se lamenter aussi bien sûr.
Mais pour se prendre au sérieux, ça
jamais.
Pour la simple et bonne raison que je
tente en menant mon petit bonhomme de chemin de ne pas me prendre au
sérieux. Sinon je retournerais sur les rails qui m'étaient
destinées à l'origine, je mettrais un tailleur gris moche et des
lunettes, je me referais mon petit carré blond strict de bourgeoise
femme d'affaire, et je regarderais de haut les gens dans le métro,
comme la première connasse venue.
Mais tout ça, ça ne me fait pas du
tout bander.
J'ai donc choisi une autre voie.
Et surtout, j'ai tenté, et je tente
toujours, de guérir certaines de mes petites blessures, mes
écorchures de l'âme... J'y travaille de façon plutôt efficace
selon mon thérapeute, mais certains diront qu'à 80 euros la
demi-heure, il est peut-être pas objectif...
Bref, tout ça pour dire que j'ai des
journées bien remplies (comme vous tous j'imagine, jusque là rien
d'original) et que le blog c'était donc une soupape de
décompression, un espace récréatif et créatif.
Rien de plus.
Un lieu pour s'épancher un peu, pour
faire des blagues pourries surtout (ma grande spécialité et y a pas
de diplôme pour ça).
Un peu en coup de vent, beaucoup sans
relire (comment ça, ça se voit??!).
MAIS surtout pas pour en espérer (ou
en souhaiter) un espace explicatif de ma personnalité tout entière
ou une fenêtre absolue sur ma vie privée.
On ne se résume pas (Dieu soit loué)
à ses écrits, à ses billets d'humeur.
Bien sûr, je ne découvre pas
qu'écrire et publier cela donne forcément lieu à des critiques,
des incompréhensions, des déformations des propos. La contre-partie
ce sont tous les bons mots, les remerciements, les
encouragements...Mais j'ai du mal quand même avec la récupération
de mes idées pour les résumer en clichés, ou pour vouloir à tout
prix en faire le fer de lance d'un féminisme forcené et agressif.
Je voulais mon propos plus léger et
plus nuancé. Si ce n'est pas toujours le cas, j'en suis désolée et
je tacherai à l'avenir de faire plus attention, mais il ne faut
jamais perdre de vue qu'il s'agit de ne pas perdre le sens de la
farce...
Et que je traite tout cela avant tout
avec second degré. Il s'agit de rire de nos pires situations, de nos
égarements et de nos impasses.
Alors c'est bien entendu formidable si
tout ce joyeux bordel suscite débat et je me réjouie que la
polémique puisse faire le buzz mais pas celui-là.
De quoi est ce que je peux bien
parler ?
Du machisme ordinaire. Celui qui surgit
au détour des conversations...et veut donner des leçons...
Pas de la virilité qui me fait tant
fantasmer (raaahhhh les hoooooommmes) et me rassure, non, du machisme bas de plafond.
De celui qui juge sans lire et sans
comprendre. De celui qui se drape de modernité et de poses
contestataires. Qui pense être porteur du retour du bonheur conjugal
en accusant l'indépendance des femmes et en prônant une nouvelle
version, soit disant revue et corrigée, du patriarcat.
De celui qui se croit subversif et
révolutionnaire. Mais qui n'est rien d'autre que la version 2.0 et
branchouille des enfermeurs de femmes dans la cuisine. Ceux
qui craignaient tant les femmes et leur liberté.
Ceux qui pensent qu'une femme qui veut
exister par elle-même, veut forcément être un homme et le dominer.
Sans soupçonner que l'on puisse vouloir être simplement entièrement
femme et égal de l'homme, en lui laissant toute la place qu'il lui
faut à lui pour exister.
Alors, à celui là je réponds
aujourd'hui, pour moi, mais aussi pour toutes les femmes de ma vie,
celles que j'aime ou que j'ai simplement croisées (ehhh oui, je ne
parle pas que de moi et pour moi, mais aussi des nanas qui
m'entourent) :
_ que ce n'est pas parce qu'on parle de
quelque chose que cela nous concerne directement, que le croire est
ridicule et dangereux, sinon plus personne ne réfléchit sur rien et
ne soutient personne, ça va devenir difficile d'écrire sur la
préhistoire, ceux qui étaient présents se faisant rares...
_ que oui, une femme peut écrire
qu'elle est insatisfaite de sa situation professionnelle, sans être
insatisfaite de sa vie privée,
_ qu'une femme peut d'ailleurs être
satisfaite de sa vie pro sans l'être de sa vie perso, ou tout autre
découpage,
_ que non, chers messieurs, le fait
d'avoir un mari formidable ne devrait pas suffire à me satisfaire et
que j'ai bien le droit d'estimer avoir droit à un épanouissement
dans la maison mais aussi HORS de la maison,
_ que, et toutes les mamans le savent,
il est grand temps de lever ce tabou grotesque et culpabilisant, qui
vise à faire croire que tout est rose dans la vie d'une jeune maman,
_ que ne pas être comblée sur tous
les plans à ce moment là ne signifie en rien que l'on aime pas son
mouflet plus que tout,
_ que l'on peut être drôle et
optimiste et quand même être triste et déçue par moment,
_ que je ne céderai pas à la
dictature du sourire de la femme comblée, au « sois joyeuse et
tais-toi »,
_ qu'il n'y a pas de honte à être
déprimée par des événements et à le dire,
_ que souffrir n'a jamais été une
tare honteuse,
_ que l'on peut discuter la place des
femmes dans la société sans être une bouffeuse de couilles au
petit dèj,
_ que l'on peut vouloir que des choses
évoluent sans accuser les hommes et même en les aimant très forts,
_ que non, le fait que mon homme me
fasse jouir au lit ne suffit pas à remplir toute mon existence et
que j'ai des velléités de construire par moi-même,
_ que ça ne m'empêche pas d'en
profiter et je vous souhaite tout pareil...
Qu'en résumé, et pour tout vous dire,
asséner en gros :
« que je manque de respect à
mon homme en écrivant que je ne suis pas satisfaite de toute ma
situation, qu'avoir mari et enfant devrait suffire à me combler et
que les femmes ne devraient pas dire qu'elles ne sont pas biens,
c'est honteux et impudique. Que j'ai un problème. Que si je me
plains d'une situation c'est une attaque contre mon mariage, mon
homme. Que ces problèmes de gonzesse, c'est de la merde. Que
c'est un truc de sales féministes, de dépressives.» est
pour le coup, une réflexion d'aigri qui a peur des sentiments
féminins et pratique avec une mauvaise foi intellectuelle évidente
et un cruel manque de sens de l'humour, des raccourcis honteux.
(Et
avant tout, c'est fou de réussir à s'enflammer comme ça pour un
simple blog !!??)
Alors
non, désolée de vous décevoir monsieur, mais les femmes pensent et
ont des envies à titre personnel, des rêves et des désillusions,
être mal n'est pas une maladie honteuse, être dépressif non plus
d'ailleurs, on ne brûle plus les mélancoliques depuis longtemps.
Mais merci de vous inquiéter, moi ça va bien, je me marre toujours
autant en contemplant l'existence.
Il est
toujours vrai qu'avoir un homme formidable est une chance inouïe et
je remercie le ciel chaque jour, mais ce n'est pas réponse à tout.
Une
chose est certaine, il doit être bien triste de vivre dans la peur
de l'altérité et de tout prendre au premier degré de la sorte, et
si jusque là je ne me sentais pas l'âme d'une féministe militante,
trouvant certains débats excessifs, je dois avouer que grâce à
cette belle démonstration de machisme inattendue, dans le discours
de jeunes mecs, je découvre qu'effectivement il y encore beaucoup de
combat à mener et que je devrai peut-être l'être un peu
plus...féministe.
Ainsi,
après avoir songé sérieusement à fermer ce blog, blessée par le
ridicule de ce type d'attaques, et navrée de la tournure que prenait
des choses qui auraient dû rester légères, je me suis dit qu'après
tout, si mes blagues pourries et mes commentaires sur le monde
peuvent au moins faire chier ce genre d'aigris, je n'aurais pas tout
perdu...
Allons-y
de bon cœur alors, et parlons, nichons, chiffons et problèmes de
nanas, pendant qu'on rigole, ils doivent se sentir bien seuls... on
va s'en donner à cœur joie !
Ton article tombe à point nommé, puisque je sors d'un cours de droit administratif où mon (respecté) professeur nous a "démontré empiriquement" que les femmes n'était pas de "nature" à supporter le stress qu'engendre la politique et que c'était la raison du fait qu'il n'y ai pas d'exemple de réussite féminine en politique en France... Simone Weill n'était pas un contre exemple suffisant, on s'est faites rembarrées quand on lui a quand même dit que ce genre de postulat était limite, et au final, même en réclamant, on n'a pas su lui faire dire qu'un avis personnel n'était pas une preuve scientifique valable. On n'a pas pour autant perdu notre sourire, on ne le pense pas misogyne, et comme tu dis "on ne bouffe pas des couilles au petit déj". Bref, je lis ton blog, et je t'encourage! Etre féministe n'est pas un gros mot.
RépondreSupprimerChère Lisa,
RépondreSupprimerMerci de ton message...je constate que je ne suis pas la seule à vivre de grands moments de solitude! Certains clichés ont la vie dure... Alors répondons en cœur à ton prof que quand bien même les femmes seraient plus sensibles au stress, cela semble un peu léger comme justification, le stress n’empêchant pas le talent, l'agilité d'esprit, le sens critique et la pugnacité. En poussant son propos, on peut aussi en déduire que si les femmes ressentent plus de stress, c'est peut-être parce qu'elles sont plus investies dans leur cause...leur absence en politique ne serait-elle dès lors pas plutôt due à leur trop grande honnêteté??...Rions encore un peu tient! Ça fera baisser notre tension nerveuse !!...