Plus de place pour les mères à l'Université ?


Alors voilà comment on se fait vider de sa formation universitaire parce qu'on a décidé de devenir maman.

Dans le monde du travail déjà on ne se fait plus trop d'illusions, le code du travail, la parité et compagnie, les boîtes se torchent avec.
On connaît et on déplore les bâtons mis dans les roues de nos poussettes...

Mais là j'avoue, je ne m'y attendais pas. Je découvre.

Dernière réforme en date pour nos chères Universités vouées à disparaître en tant que temple du savoir et de l'éveil de nos consciences (voyons on ne va pas continuer à former des gens qui pensent ça pourrait nous retomber dessus un jour ! Imaginez qu'ils se mettent à contester... ), il convient de demander par avance l'autorisation de redoubler ton année parce que les rattrapages ça n'existe plus et le temps et le droit à l'erreur non plus.
Et attention, il y a des critères et des conditions très sélectives.

Il faut être un étudiant vachement organisé pour être capable de prévoir dès septembre que tu vas avoir une année pourrie, que tu vas te faire larguer, perdre ta grand-mère ou te casser la gueule en vélo.

Mais bon comme t'es trop fort, tu anticipes et tu pressens si tu vas être au taquet ou pas.

Et puis si t'es pas au top, et bien la fac te vire et tu n'as qu'à aller te faire voir ailleurs avec ton demi master qui ne sert à rien.

J'en étais là et j'me suis dit, bon moi j'ai un p'tit chou et il faut que je termine ma formation.
Oui excusez-moi d'être mère et d'avoir quand même envie d'avoir une activité intellectuelle.

Bienvenue à Paris :
alors on commence par chercher à faire garder mouflet, ça se corse.

La crèche, tu rêves, 1 enfant sur 6 a une place potentielle.
Comme j'ai encore pas assuré en anticipant pas, en allant faire copain/copain avec les gars de la mairie ou en poussant mon meilleur pote à devenir conseiller municipal et que j'ai pas pensé à mettre de coté pour soudoyer un fonctionnaire quelconque, je me retrouve fort dépourvue (lorsque le rentrée fut venue).

Je pars en quête d'une assistante maternelle ou autre nounou, j'en trouve une super (denrée rare, celles qui s'y sont frottées le savent) et voilà que je comprends qu'à moins d'un demi SMIC mensuel ça va pas être possible de faire garder mouflet rien qu'à MI-temps !

Ok,ok je prends, j'ai pas vraiment d'autre choix.

Hop hop, libérée à mi-temps des couches et rototos divers, je reprends gaillardement mon plus beau cartable et je retourne sur les bancs de la fac, réclamer le précieux savoir.

Et attention je suis trop forte, j'anticipe, et je demande (par avance, par écrit, en 33 exemplaires, les formulaires b12, b42, et bis, en 4 langues....bref) une dérogation afin d'effectuer mon année en deux ans, puisqu'un mi-temps, si mes vieux restes de maths sont bons, ça me permet de faire la formation en deux ans.

C'est une bonne justification.

Mais l'administration ne voit pas le monde de cette façon là.

À ma grande surprise, on m'a répondu que j'étais bien gentille mais qu'avoir un enfant n'était pas une raison pour avoir le droit de faire un an en deux et que, en gros, j'avais qu'à le faire garder à temps plein si je voulais faire des études.

J'ai demandé immédiatement comment la fac comptait financer ça, parce que vu que c'est eux qui m'imposent une garde à temps plein j'imagine qu'ils payent le SMIC de la nounou ??
Ou alors ils imaginent qu'étudiante = pétée de cash (mais sur quelle planète vivent-ils??).

Si tu es maman, que tu veux continuer à te former (devenir maman ne voulait pas dire enfermement il me semble) et bien il faut être riche et il ne faut pas avoir envie de profiter de ton enfant dans ses plus jeunes années.

IL FAUT CHOISIR MA PTITE DAME.

Je leur dis donc que c'est autant une question de contrainte financière que de choix personnel, et que j'ai bien le droit de vouloir aussi passer du temps avec mon enfant.

Que nenni. Rien à secouer.

Formidable réponse de la préposée, grandiose de courage et d'engagement en faveur des femmes :

«_ vous me virez alors ?
Et j'lui déballe mes palmes académiques et mon tableau d'honneur et blablabla. Indifférence totale.
_ah non, on vous impose de tout faire à temps plein c'est pas pareil.
_oui mais c'est matériellement impossible, donc je me retrouve avec une demi année qui sera validée et qui ne servira à rien.
Grotesque.
Je vais donc devoir aller en amphi, en TD et en stage avec bébé sous le bras, qu'on rigole ?!
_si au moins votre bébé était malade, avait des problèmes de santé (sic!!) et qu'un médecin en attestait, ça fonctionnerait peut-être la dérogation.
_je suis confuse mais mon bébé est en bonne santé ! »

Grotesque je vous dit.

C'est vrai quoi, j'assure pas moi aussi à avoir un bébé qui va bien et à ne pas avoir un SMIC de rab' par mois sur mon compte.

La morale de cette histoire, c'est qu'au 21ème siècle, si tu veux devenir maman et bien tu ne nous emmerdes pas à avoir des velléités d'activités intellectuelles et de suivre des études, tu restes à la maison et tu fais des petits pots bio.

Ou alors fallait pas faire d'enfants. Ou en faire des malades, si j'ai bien compris (!).

On a attendu tout ce temps pour en arriver là, renvoyer les mères au foyer sous la contrainte financière et le manque d'aménagements pour leur faciliter la vie.

Punir une fois de plus celles qui ne veulent renoncer ni à la maternité, ni à avoir une activité en dehors ce rôle là.

Effrayant.


Nous sommes au 21ème siècle et je suis à la rue devant mon Université......un couffin sous le bras...

Commentaires

  1. Ecoeurant!
    C'en est décidément fini de l'égalité des chances (sauf dans les discours)
    Un recours judiciaire ne serait pas forcément du temps perdu...
    Si ça peut vous consoler, merci pour la qualité de vos billets, la diversité des sujets abordés et votre approche constructive du féminisme, qui change de celle des peine-à-jouir qui monopolisent le débat public sur ces questions!

    Johnito
    (Eh oui, un lecteur masculin!)

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  2. bon, pour te consoler je propose que tu troques ton demi-master par un munster entier (beaucoup plus réconfortant). Le fromage c'est comme le pâté ça repulpe les rides.

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  3. Salut Amandine,
    J ai lu ton article et je tiens a te dire que ce que tu as vécu est une situation particuliere a Paris 5. A Nanterre paris 10, on n a pas cet obligation d ecrire des lettres si on veut faire le master en deux ans. J'en ai fait l experience. Donc n hesite pas a postuler a nanterre plus tard si tu veux reprendre. et laisse tomber paris 5...on sait comment ils sont sélectifs au niveau économique et pas éducatif a la base.
    Gros bisous a toi et ton bébé!
    P.S. j aime bien ton blog :)

    Nihan

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  4. Merci bcp Nihan
    j'ai dans l'idée dès que j'aurai plus de visibilité de terminer le master ailleurs et Nanterre semble une bonne possibilité, s'ils acceptent que tu fasses le Master en plusieurs années, à l'ancienne, sans justification, en redoublant quoi !mais j'ai peur que cette nouvelle politique universitaire ne se généralise rapidement...
    Donne moi des news quand tu veux, Gros bisous

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