Fais bander et tais toi, la féminité a-t'elle vendu son âme au sexy ?

Je ne sais pas vraiment si c'est une bonne ou une mauvaise nouvelle, mais 

finalement toutes les femmes se ressemblent un peu.

Ou plutôt, moi je ressemble un peu à toutes les autres.

On se croit différente, mais en réalité que dalle. On retombe vite dans certains écueils.

Comme par exemple cette envie terrible d'être désirable, « sexy » en quelque sorte.

Et surtout cette gêne quand on ne l'est pas. Pas sexy aux yeux du reste du monde.

Parce que ne pas l'être devant son homme, ou encore celui que l'on veut séduire, effectivement c'est gênant. Je dirai même plus ,si on ne l'est pas, c'est pas gagné. Et il est donc bien légitime de tout mettre en œuvre pour être désirée par notre homme (du moins si tout le frotti frotta entre êtres humains nous intéresse, sinon démerdez-vous).

Mais quand notre homme, notre élu, notre aimé, notre plan C, ou n'importe quoi dans ce goût là, nous trouves désirable, là, telle que l'on est, sans forcément avoir besoin d'en rajouter et de rentrer dans ce que j'appellerai les « signes extérieurs » de sexyness imposés socialement, pourquoi cela ne nous suffit-il pas ?

Il y a le besoin de nous plaire à nous même me direz-vous. Bien entendu, mais cela va au-delà. Comme si nous nous sentions coupable de ne pas être désirable, pour, et devant tous.

Mais d'où vient cette pression ? Ce devoir d'être sexy, d'être celle capable de faire bander les hommes, dans la rue, la boulangerie, la station essence.....et de faire enrager les autres femmes par la même occasion.

Attention, je ne dis pas que je trouve désagréable d'être regardée et désirée, mais j'aimerais me sentir pleinement libre de n'user du sexy que pour ceux chez qui j'ai envie de susciter l'érection et pas plus, et ne pas me sentir étrangement nulle, moche, mal fagotée, pas féminine ou que sais-je encore, lorsque je décide de ne pas répondre à la dictature du sexy pour aller me balader au parc ou chercher le pain. Les femmes devraient pouvoir jouir de la possibilité d'être sexy et de ses plaisirs, sans que cela ne soit une condition sine qua non de la féminité.

Et aujourd'hui, tout me semble confus.

Les frontières effacées entre le sexy et le féminin, entre le soit femme et le fait bander.

Le fait bander comme injonction suprême du siècle.

Et bien alors, en tant que femme libre, je revendique le droit de choisir d'être sexy ou non selon les moments et les envies, et je refuse de voir ériger en seul critère de féminité et de la beauté, une sexy attitude qui me semble finalement archaïque.

Et je suis donc navrée, en premier lieu par moi-même, par mes réactions spontanées de fierté ou de gêne lorsque je me promène, et par mon manque de détachement, je suis la première à être mal à l'aise face à cette pression ridicule. 

Et je constate ses dégâts régulièrement.

Les adolescentes que je croise dans mon boulot sont quasiment toutes perdues dans cet océan d'injonctions contradictoires.

Sois indépendante et libre mais belle et sexy surtout.

Récemment, un concours d'élégance a été organisé au sein d'un établissement scolaire parisien, et il était surprenant de voir comme pour ces jeunes filles, élégance équivalait à tenue très sexy.

En toute sincérité, ces lycéennes s'étaient apprêtées de manière très chic selon elles, alors qu'en réalité, la hauteur des talons, les mix moulant et mini, et les décolletés, cumulés aux style des coiffures et du maquillage rappelés plutôt Eve Angelli au salon du hard que l'élégance à la française.....

C'est quand même inquiétant que toute une génération de minettes confondent à ce point suggestion du sexuel et sexuel affiché. Comme si être élégante devait être synonyme de déclenchement automatique d'érections chez la gente masculine.

Fais bander et tais toi. Joli programme.

Ainsi donc, être jolie aujourd'hui n'est plus le seul diktat, il faut aussi être bandante. Comme si ça ne suffisait pas.

Et nous voilà paumées, une fois de plus.... On veut bien sûr être jolie (et déjà rien que cette nécessité de la beauté est discutable, ou du moins sa nécessaire mise en pole position dans les attributs de la féminité), mais en plus il faut être branchée et maintenant bandante pour être à la hauteur ??

Mais c'est quoi qui nous fait plaisir à nous déjà ? Chacune avec son petit tempérament perso.

On avait envie de quoi nous dans tout ça ? Et de faire bander qui déjà ?

Nous faire croire qu'il faut faire bander plus, pour nous vendre plus.

Femmes culpabilisées de ne pas être assez désirables aux yeux de tous nos congénères, quel recul dans le temps et les mœurs quand on y pense ! Et partout on y ajoute la même confusion entre la sexualité offensive et la sexualité suggérée, entre déballer et espérer entrevoir...... finalement il n'y a plus grand chose de si « sexy » là dedans, le mot lui même a été vidé de sa substance initiale......

Je vais peut-être garder ma guêpière sous ma combi de ski et tant pis pour l'absence d'érection des passants dans la rue.......

À bon entendeur.....